LE MAGAZINE DU RÉSEAU DANIEL MOQUET
Accueil›Les dossiers›La végétalisation des villes
Depuis le début du XXIe siècle, nous observons le paysage urbain changer, évoluer et s’adapter aux problématiques actuelles, notamment environnementales ou sociales. Pour y répondre, de nombreux projets de végétalisation urbaine voient le jour. En France, et notamment dans la capitale, le projet “Végétalisons Paris ”, défendu par la maire Anne Hidalgo, a pour but de “ développer et cultiver de nouveaux espaces de nature en ville ” en créant par exemple le “ permis de végétaliser ” ou encore l’aménagement de fermes pédagogiques.
Cela a été prouvé, les espaces verts en ville présentent de nombreux avantages pour l’environnement.
En effet, la présence de végétaux en milieu urbain permet de réduire certains effets du réchauffement climatique. On observe par exemple que les toitures et murs végétalisés apportent un complément à l’isolation des toits et des bâtiments, ce qui permet ainsi de faire des économies d’énergie, et indirectement de réduire l’émission de gaz à effet de serre (GES). Une solution astucieuse, et esthétique puisque de nombreuses agences de paysagisme redoublent d’ingéniosité et de créativité pour présenter des projets toujours plus beaux et innovants. La végétation urbaine contribue, en outre, à atténuer le phénomène d’îlots de chaleur, très présent en ville, en apportant des “ îlots de fraîcheur ” permettant ainsi de réguler la température.
Ramener un peu de nature en ville aide donc à rafraîchir l’air, mais ce n’est pas tout. La végétation contribue fortement à filtrer et absorber des particules atmosphériques et certains polluants, permettant une purification de l’air. Selon l’ADEME, un “ arbre mature peut piéger jusqu’à 20 kg de particules par an ”. La présence d’arbres en ville contribue également à l’assainissement de l’air.
La végétalisation en milieu urbain a un effet positif sur notre santé, que ce soit notre santé physique ou notre santé mentale, et c’est prouvé. L’association pour la "Prévention de la Pollution Atmosphérique" du NordPas-de-Calais (APPANPC) explique que les personnes évoluant dans un “ environnement pourvu d’espaces verts ” ont une meilleure santé physique globale et “ déclareraient moins de problème de santé ”. Ces espaces verts auraient aussi des effets thérapeutiques sur les personnes souffrant de maladies respiratoires. La nature joue également un rôle sur notre bien-être psychologique. Et oui,la végétation a un effet psychologique positif ! Quand on pense à la nature, on imagine souvent de grands espaces verts qui nous apportent un sentiment de bienêtre, d’apaisement et de sérénité, et cela a été démontré !
“ Il a notamment été montré que la proximité d’espaces verts ou leur vue permet d’améliorer le bien-être sur le lieu de travail en diminuant l’incidence des maux de têtes chez les salariés ”
selon l’APPANPC.
Mais la végétalisation n’est pas seulement bénéfique pour l’environnement, elle représente également une opportunité pour créer du lien social et favoriser l’échange entre les habitants d’une ville, ou à plus petite échelle, d’un quartier. Et cela se manifeste généralement par la présence de jardins. On en distingue trois types.
C’est en fait la version actuelle des “ jardins ouvriers ” du XIXe siècle. Ces jardins permettent aux propriétaires (généralement des familles) de cultiver leurs propres fruits et légumes, mais aussi d’échanger entre propriétaires de parcelles. Il existe d’ailleurs une Fédération Nationale des Jardins Familiaux et Collectifs depuis 1886 (renommée ainsi en 1996).
Le jardin partagé « Prinzessinnengärten »à Berlin (quartier Moritzplatz)
« Le Jardin des Princesses » en Français, est un jardin partagé pas comme les autres. Ancien terrain vague de 600m2 transformé en jardin partagé, c’est devenu un véritable espace de vie et d’échange. On peut s’y retrouver pour déguster les légumes cultivés (agriculture biologique) dans le jardin ou boire une bonne bière. Ce sont plus de 500 variétés de fruits, légumes et plantes aromatiques qui sont cultivés par environ 200 personnes dans ce jardin. Totalement autonome financièrement, cet espace vert vit grâce à la vente de ses produits et notamment au petit restaurant installé au cœur du jardin ! (Source : prinzessinnengarten.net)
Ces jardins sont construits, cultivés et entretenus collectivement par les habitants d’un quartier. Ils ont une fonction communautaire puisqu’ils rassemblent des citadins autour d’un même espace convivial où l’échange et la solidarité sont les maîtres mots. Ce concept trouve son origine dans les années 70 à New York avec les “ community gardens ” (ou “ pocket garden ”) ayant pour but de “ reconquérir les espaces urbains abandonnés ”.
Ces jardins offrent une opportunité de retrouver un statut social et de revenir progressivement dans le monde du travail. Ces initiatives sont déjà testées dans le milieu carcéral, notamment aux ÉtatsUnis. Ces espaces permettent également de lutter contre l’isolement social et la précarité économique. À Paris, Emmaüs Solidarité a d’ailleurs employé des sansabris pour entretenir des espaces verts abandonnés transformés en jardins.
Les jardins ne sont évidemment pas les seuls acteurs de la vie sociale en ville : les jardins publics, les parcs ou encore les squares représentent des lieux de vie, de rencontre et d’échange entre les habitants d’une ville.
Le développement de l’agriculture urbaine est également au cœur de la démarche de végétalisation des villes, avec notamment l’essor des “ fermes urbaines ”.
Les citadins sont d’ailleurs de plus en plus soucieux de ce qui arrive dans leurs assiettes et de la façon dont c’est produit.
De nombreuses initiatives de fermes urbaines “ sortent de terre ”.
Oui oui, vous avez bien lu, une ferme urbaine a “ poussé ”... dans un ancien parking abandonné en plein Paris (18e arrondissement). C’est pour répondre à un appel à projet lancé par la ville de Paris en 2016 (les “ Pariculteurs ”), que deux jeunes, Théo Champagnat et JeanNoël Gertz, ont créé cette ferme urbaine. Dans leur “ parking-ferme ”, ils produisent des champignons, des pousses de légumes (radis, roquette, moutarde), et plus récemment des endives. Leurs clients sont des riverains, des restaurateurs parisiens, des AMAP ou encore des petits supermarchés, qu’ils livrent à vélo bien sûr ! Original non ?
Cette démarche a notamment pour but de favoriser le circuit-court, avec des produits certifiés “ agriculture biologique ”, en plus ! Les industriels aussi se mettent à l’agriculture urbaine et au circuit court : c’est le cas de la chaîne canadienne de supermarchés IGA, qui, sur le toit de l’un de ses supermarchés (Montréal), cultive ses fruits et légumes. Ils seront ensuite vendus dans ce magasin. Ce potager de 2000 m2 a vu le jour en Juillet 2017. Sur le toit, ce sont plus de 30 variétés différentes de fruits et légumes mais aussi 8 ruches d’abeilles qui sont cultivées et entretenues. Niveau traçabilité, on peut difficilement faire mieux !
La végétalisation des villes est donc bien un enjeu majeur pour l’environnement et beaucoup l’ont compris. Elle offre des solutions efficaces pour préserver l’environnement. Mais pas que, puisqu’elle favorise le lien social via les jardins partagés et autres initiatives collectives et citoyennes.