LE MAGAZINE DU RÉSEAU DANIEL MOQUET
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Où en serait notre connaissance du monde végétal si, avant nous, des scientifiques n’avaient pas eu l’idée de rassembler en un même lieu les plantes récoltées aux quatre coins du monde ?
Au début… La Renaissance ! Cette période trouve son origine en Italie vers le XIVe siècle, puis s’étend dans le reste de l’Europe aux XVe et XVIe siècle. C’est une période de découvertes : l’imprimerie qui va permettre une meilleure diffusion du savoir, les explorateurs qui sillonnent les mers et trouvent de nouvelles voies maritimes et de nouveaux continents. Les cours européennes se passionnent pour les arts et les sciences. C’est dans ce contexte que vont naître les jardins botaniques.
Le premier des premiers !
Le premier jardin botanique universitaire est créé à Padoue (Italie – Vénétie) en 1545. C’est l’exemple le plus ancien de ce type de bien ayant survécu, et qui a conservé son plan d’origine. Il est au tout début des jardins botaniques en Europe et il représente la naissance de la Botanique, des échanges scientifiques et de la compréhension des relations entre nature et culture.
Le jardin de Padoue renferme deux collections importantes : sa bibliothèque qui contient plus de cinquante mille volumes et manuscrits, et son herbier, deuxième d’Italie par sa taille. Des plantes rares y sont rassemblées et cultivées. Actuellement, plus de six mille espèces y sont classées suivant des critères systématiques, utilitaires et environnementaux, et sous forme de collections thématiques. Le jardin botanique de Padoue a été une source d’inspiration pour de nombreux autres jardins en Italie et en Europe.
Selon l’index Herbariorum (2008), il existerait dans le monde plus de 3400 herbiers regroupant 350 millions d’échantillons ou parts d’herbiers répertoriés sur les 400 dernières années.
Et en France ?
En 1593, Henri IV confie à Pierre Richer de Belleval (enseignant en Botanique) la création d’un jardin royal à Montpellier. Ce sera le premier jardin botanique français. Il est inspiré du “jardin médical” de Padoue.
Lors de sa création, il est consacré à la culture des “Simples” (plantes médicinales). Mais le projet initial est rapidement dépassé, et le jardin devient un véritable outil d’étude botanique, inédit à l’époque.
Dès le début du XVIIe siècle, il évolue : c’est non seulement un jardin scientifique avec une importante collection de végétaux, mais il fait figure de précurseur dans sa manière d’appréhender la diversité du milieu végétal : il reproduit différents milieux (ombragé, ensoleillé, humide, sablonneux, pierreux…) et consacre des emplacements spéciaux aux plantes exotiques. Du jardin d’origine, il ne reste aujourd’hui que la “Montagne de Richer”. Cet espace, formé d’un tertre avec 5 terrasses sur chaque versant, présentait essentiellement la flore locale. Au fil du temps, il s’enrichit d’une “école de systématique” (site école où les plantes sont regroupées par familles botaniques), puis d’une serre chauffée, d’un jardin anglais, d’une serre tempérée et d’un bassin, d’un petit observatoire…Aujourd’hui le jardin des plantes de Montpellier présente une superficie de 4,6 hectares avec une surface sous serre de 688 m2 et une orangerie de 267 m2. Il totalise 2 679 espèces. Destiné à la recherche scientifique, il s’affiche comme un centre d‘études taxonomiques et horticoles ouvert à la coopération internationale. Il fait, en permanence, l’objet d’enrichissement et de sauvegarde des collections animées (plantes) et inanimées (ouvrages, iconographie, herbier). Le jardin botanique de Montpellier a inspiré celui de Paris créé en 1635.
À Paris …
Le jardin des plantes, dans son état actuel s’étend sur 30 hectares. Il est constitué d’une suite de jardins et de serres, à commencer par des parterres à la française. On y trouve : une école de botanique où sont répertoriés 4 500 végétaux présentés par famille, un jardin Alpin de 4 000 m2 où poussent 2 000 plantes originaires des montagnes du monde entier, de grandes serres abritant des plantes exotiques, un labyrinthe constitué de plantes méditerranéennes et à feuillage persistant (les chênes verts, les pins, les cèdres, les Ifs et les buis), une Bibliothèque, une Roseraie où 170 espèces retracent l’histoire de la rose, un jardin d’Iris... et aussi, une ménagerie ! Depuis 1995, Le Jardin Botanique de la Ville de Paris est constitué de 4 jardins : le parc Floral de Paris, le parc de Bagatelle, l’Arboretum de l’école Du Breuil et le jardin des serres d’Auteuil. Ils couvrent une superficie totale de 73 hectares. Les reconstitutions de biotopes, les jardins thématiques et l’arboretum, ainsi que les collections spécialisées, rassemblent près de 20 000 plantes.
Le plus grand arbre du monde est le séquoia à feuilles d’If (Sequoia sempervirens). C’est un conifère d’Amérique du Nord qui vit naturellement sur la côte Pacifique des États-Unis, dans les montagnes californiennes. Le spécimen le plus grand connu actuellement porte le nom d’Hypérion et mesure 115,55 mètres. Il pourrait avoir 3000 ans !
Un petit tour par les collections…
On parle beaucoup de “collections” de plantes dans ces jardins. Justement, à Montpellier, le jardin des plantes présente des collections intéressantes. À commencer par “L’école de Systématique de Candolle” site-école où 250 espèces sont cultivées dans un endroit protégé en raison de leur fragilité. Cette partie du jardin n’est d’ailleurs ouverte qu’aux visites de groupes. A voir également, la collection de Cistes : c’est sur le versant Sud de la Montagne de Richer que poussent ces plantes méditerranéennes de garrigue, connues pour leur résistance à des situations arides. Une dizaine d’espèces et leurs hybrides figurent dans cette collection. Un arboretum datant du XIXe siècle abrite plus de 170 arbres. Ils constituent une collection remarquable par l’âge et la taille de certains sujets : la pacanier, le Ginkgo, l’oranger des Osages ou le Phyllaire de la montagne. D’autres, moins impressionnants par leur taille, mais particulièrement rares ou présentant un intérêt botanique : le Cyprès de l’Atlas, le Chêne faux kermès, le Genevrier alligator. Ce jardin recèle aussi : des plantes “succulentes”, plantes grasses dont les plus populaires sont les cactus (400 espèces figurent dans cette collection), une belle collection de palmiers à découvrir dans tous les secteurs du jardin, et en gestation, une collection de plantes médicinales. Les 164 espèces prévues occuperont le carré des médicinales de “L’école de Systématique”.
Jardin botanique : utile et agréable
Les premiers jardins botaniques avaient vocation à servir la médecine. Ils étaient, pour les scientifiques, un lieu privilégié d’observation des plantes. Dans ces jardins, les plantes sont étiquetées, leur évolution est suivie de près. Triées selon des critères scientifiques, elles suivent une classification bien précise. Certains jardins botaniques ont reçu leurs plantes ou leurs arbres à l’état de graines issues de plantes sauvages venues de pays lointains. Des dizaines d’années plus tard, elles sont devenues des références historiques du jardin. Ces plantes peuvent être l’objet d’études scientifiques (recherche de molécules utiles pour la médecine, recherche sur la résistance aux climats, etc...). Le Jardin Botanique joue un rôle important dans la conservation des plantes menacées d’extinction. En les cultivant et en les échangeant au sein d’un réseau de jardins et d’instituts botaniques partenaires, il participe à la sauvegarde de la biodiversité. Il a aussi un rôle auprès du grand public : il sert de support et d’illustration à la diffusion des connaissances sur les végétaux du monde entier. Les jardins sont des outils pédagogiques à destination des écoliers qui viennent ici découvrir à quoi servent les plantes, quels sont leurs cycles de développement. Ils sont un vecteur de communication sur la nécessité de sauvegarder la nature et par la même, notre planète. On y vient également pour son plaisir : ces jardins, en effet, se situent bien souvent au cœur des villes. Une promenade, un dimanche après-midi, sous les arbres plusieurs fois centenaires d’un “jardin des plantes” comme on l’appelle fréquemment, est un moment de détente où l’on se ressource au contact d’une nature absente de notre environnement quotidien. Souvent agrémentés de plans d’eau et d’espaces d’accueil, ils invitent à la méditation, au calme, et à la balade romantique.
Sources : Une histoire des jardins botaniques - entre Science et Arts paysagers - Yves-Marie ALLAIN (QUAE) - Université de Montpellier : umontpellier.fr - mairie de Paris - equipement.paris.fr